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08/06/2008

Go ahead Ireland: halte aux Eurofossoyeurs

Jeudi, l'Irlande pourrait rejeter le traité de Lisbonne, un texte jugé compliqué qui inquiète la population.

PENDANT que l'Europe retient son souffle, à six jours du référendum sur le traité de Lisbonne, les Irlandais continuent de s'arracher les cheveux. Leur pays va-t-il de voir renoncer à sa neutralité, autoriser l'avortement, ou même… la détention des enfants de 3 ans, comme l'affirme le camp du non ? Ce texte est-il « le plus équilibré que nous ne pourrons jamais obtenir », comme le martèle le gouvernement ? Dans le doute, c'est le slogan repris aux adver saires du traité de Nice, rejeté par les Irlandais en 2001, qui s'impose : « Si vous ne savez pas, votez non ! »

Pour la première fois depuis le début de la campagne, un sondage, publié hier par l'Irish Times, place le « non » en tête : avec 35 %, il est en progression constante, tandis que le oui plonge à 30 %.

Principale raison invoquée par les « nonistes » : ils ne comprennent rien à ce traité dit « simplifié ». L'Irlande, unique pays européen à être tenu, de par sa Constitution, d'organiser un référendum, s'ap prête à se prononcer sur un texte que seuls 5 % des électeurs affirment comprendre, et que per sonne ou presque n'a lu entièrement. Brian Cowen, le nouveau premier ministre, « n'a pas eu le temps ». Charlie McCreevy, le commissaire européen de Dublin, a même confié qu'il ne s'attendait pas à ce que « des Irlandais sains d'esprit » le fassent. Quant au vice-premier ministre, Mary Cough lan, elle n'a visiblement pas tout compris, elle qui a assuré récemment que « certains grands pays comme l'Allemagne »avaient ac tuel lement « deux commissaires eu ropéens », ce qui n'est plus le cas depuis 2004…

Pour les opposants au traité, ces maladresses sont du « pain bénit ». « Comment veulent-ils qu'on leur fasse confiance, alors qu'ils démontrent leur totale incompétence en matière européenne » , se gausse Declan Ganley, fondateur de l'organisation Libertas. Ce héraut du « non », un jeune chef d'entrepris e multimillionnaire, se présente comme « passionnément proeuropéen », mais milite pour plus de démocratie et de transparence au sein des institutions européennes.

À la sortie des églises ou des entreprises, il distribue ce traité « que le gouvernement n'a pas pris la peine d'envoyer aux électeurs ». « Des faits, pas de politique, répète-t-il. Jusqu'ici, l'Europe a été béné fique à l'Irlande, ne changeons rien… » Seul parti parlementaire à s'opposer au traité, le Sinn Féin marque lui aussi des points. « Nous voulons un meilleur deal pour l'Irlande, clament ses militants. En fait, c'est un non pour un meilleur oui. »

Craintes d'une harmonisation fiscale
Principaux sujets d'inquiétude, la « clause de solidarité » prévue en cas d'attaque terroriste qui, selon les adversaires du traité, remettrait en question la neutralité du pays. Ainsi que l'harmonisation fiscale, souhaitée notamment par la France, qui marquerait la fin des taux d'imposition extrêmement bas (notamment 12,5 % pour les sociétés), considérés par Dublin comme l'un des secrets de sa réus site. « Ils voudraient qu'on paie les mêmes impôts qu'en France, s'étrangle Declan Ganley. Il est essentiel que nous gardions le contrôle de nos investissements étrangers. Ce n'est pas le cas avec ce traité. »

Viennent s'ajouter les craintes personnelles des électeurs, alors que l'essoufflement du fameux « Tigre celtique » commence à les faire douter des bienfaits de l'Union européenne. La confiance des consommateurs est en chute libre, la croissance (5,3 % en 2007) devrait être divisée par deux cette année et le chômage (5,5 %) est reparti à la hausse. « Du coup, ils mettent tous leurs problèmes sur le dos du traité », déplore un militant du oui. Des opposants à la fermeture de plusieurs services d'un hôpital de province ont ainsi appelé à voter non…

Soupçonné de corruption, l'ancien premier ministre, Bertie Ahern, a démissionné il y a un mois, afin d'éviter un vote sanction. Négociateur de la première mouture du traité, le nouveau taoiseach, Brian Cowen, ne sait plus où donner de la tête. À bord de son « Yes-Bus », il sillonne sans relâche les routes irlandaises, se faisant tantôt menaçant, tantôt conciliant, comme avec la puissante Association des agriculteurs irlandais, à laquelle il a promis d'« utiliser son veto si un accord inacceptable pour l'Irlande est soumis au vote » lors des pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Les trois principales formations politiques, les syndicats, les organisations patronales et agricoles ont beau soutenir le traité, « c'est difficile de le rendre excitant… », soupire Enda Kenny, leader du parti chrétien-démocrate Fine Gael.

« L'appel à la paranoïa nationale est toujours beaucoup plus fort que la rationalité, analyse Alan Dukes, ancien président de l'Institut des affaires européennes. Que se passera-t-il en cas de victoire du « non » ? La seule réponse honnête est : on ne sait pas. »

En tout cas, les autorités ont déjà prévenu : « Cette fois-ci, il n'y a pas de plan B. » Car « le traité de Lisbonne, c'est déjà le plan B ».

SOURCE: www.figaro.fr

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