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28/01/2011

Côte d'Ivoire: poker menteur

Côte d’Ivoire : poker menteur? Le nouveau président ivoirien Alassane Ouattara, invalidé par le Conseil constitutionnel, a affirmé vendredi que le président sortant Laurent Gbagbo devra vite se démettre de gré ou de force. Pourtant, ses fidèles (Jeunes Patriotes, garde présidentielle), qui auraient reçu des renforts en miliciens et en armes du Liberia et de l’Angola, affirment que les masses et les capitales africaines les soutiennent. Certes, l’erreur de Gbagbo est d’être revenu sur sa parole après avoir légitimé son adversaire (en débattant avec lui) et accepté le verdict des urnes. Mais des fraudes ont bien eu lieu dans le Nord et rappelons qu’en 1992, lorsqu’il était premier ministre, Ouattara le « démocrate » réprima l’opposition et emprisonna Gbagbo …

Soutenu par le président angolais « anti-impérialiste » Eduardo Dos Santos, Gbagbo séduit nombre d’Africains lorsqu’il accuse les Occidentaux d’agir en néo-colonisateurs en Côte d’Ivoire au nom de la démocratie tout en soutenant des Etats où les élections sont inexistantes ou truquées : Arabie saoudite, Egypte, etc. Par ailleurs, Gbagbo et son influente épouse Simone, chrétienne évangélique pro-israélienne, accusent Ouattara et son Premier Ministre Guillaume Soro, chef des rebelles musulmans du Nord, qui tenta un coup d’Etat en 2002, de vouloir islamiser la Côté d’Ivoire. Cette ligne de front Islam/chrétienté, qui divise tant d’Etat d’Afrique noire aux frontières artificielles (Nigeria, Soudan, etc), est souvent occultée.
Le Soudan incarne de façon emblématique cette coupure : dimanche, les populations du Sud du Soudan ont commencé à voter pour ou contre l’indépendance du Sud Soudan, qui bénéficie d’un statut d’autonomie depuis la fin de la guerre civile qui opposa de 1983 à 2005 le nord arabe-musulman au sud chrétien-animiste et noir. En cas de victoire du oui, l’actuel vice-président du Sud-Soudan, Salva Kiir Mayardit, deviendrait le premier Président du sud indépendant. Mais le pouvoir islamiste-militaire de Khartoum, qui perpétra un génocide contre le sud (2 millions de morts) et continue de massacrer les populations musulmanes noires du Darfour, peut difficilement accepter de perdre le Sud qui abrite les 2/3 des réserves de pétrole du pays et d’avoir à ses frontières un Etat pro-américain et pro-israélien. Certes, le dictateur soudanais Omar el Bachir, qui est soutenu ou armé par la Chine, la Russie et les pays islamiques, prétend accepter la décision des sud-soudanais afin de tenter d’échapper à une condamnation internationale pour génocide. Mais en attendant les résultats du référendum dans une semaine, les armées du Sud et du Nord sont prêtes à se battre.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) : Deux nouveaux otages français enlevés vendredi par Aqmi ont été tués samedi au Niger. Le sort des 5 otages français déjà détenus au Nord-est du Mali depuis septembre 2010 et que Paris tente de faire libérer est plus incertain que jamais. Les cellules terroristes d’Aqmi se multiplient partout en Afrique saharienne. Ils s’appuient sur les réseaux de trafiquants de drogue, d’immigration clandestine et recrutent maintenant parmi les rebelles du Front Polisario qui veulent l’indépendance du Sahara occidental. Mercredi dernier, les services de sécurité marocains ont démantelé une cellule de 27 jihadistes cherchant à implanter Aqmi au Maroc, fait nouveau. La riposte face à la multiplication des réseaux criminels terroristes doit donc être globale et nécessite plus de coopération entre les pays de la région, hélas souvent en conflits frontaliers et idéologiques.
Faut-il avoir peur de l’islam ? D’après un sondage IFOP publié mardi dernier par Le Monde, 42 % des français voient l’islam comme "une menace" pour leur identité nationale et 75% estiment que les musulmans n'ont pas réussi ni voulu s'intégrer. Ce sondage m’inspire deux commentaires. 1/ les thèmes de l’islam et de l’identité pèseront lourd dans le débat des présidentielles de 2012. Les partis modérés auraient tort de les ignorer et de laisser les extrêmes s’en emparer. 2/ La machine à intégrer doit être relancée d’urgence afin de préserver ce « vouloir-vivre ensemble » dont a parlé Nicolas Sarkozy le 7 janvier devant les responsables religieux, après avoir condamné les agressions de chrétiens en Egypte et en Irak et invité les croyants à ne pas importer les conflits du Moyen Orient sur le territoire français. Par ailleurs, plutôt que de déplorer que la dénonciation des persécutions de chrétiens en pays musulmans ne favorise l’islamophobie, le Président du Conseil français du Culte musulman M. Moussawi et les responsables musulmans du monde entier ne devraient-ils pas aussi réformer les enseignements de la Charià et du Coran qui stigmatisent les non-musulmans ?

Alexandre del Valle est géopolitologue, auteur de nombreux articles et ouvrages dont "Le Totalitarisme Islamiste" et "Le Dilemme Turc" parus aux éditions des Syrtes.

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