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24/04/2006

Le droit occidental, la femme et la charia

La Convention marocaine
La loi de 1975 a indigné les Marocains qui ont engagé la négociation pour conserver à leurs ressortissants émigrés « les principes fondamentaux de leur identité nationale ». La France, elle, voulait préserver l’éfficacité des décisions de garde de la mère française issus de couples mixtes, décisions non reconnues au Maroc, puisqu’elles entravent l’exercice de la tutelle paternelle sur l'enfant, exposé à être éduqué dans une religion autre que celle du père. Un climat d’ouverture régnait avant même la signature de l’accord en 1983 (Arrêt Robbi, 1983). Ainsi deux époux marocains mariés au Maroc s’installent-ils en France ; le mari demande le divorce, et la femme forme une demande reconventionnelle. Le mari évoque alors une répudiation « préventive » intervenue au Maroc à l’insu de sa femme, sept mois avant que le divorce ne soit prononcé. La Cour de cassation consacre cette répudiation (discrimination, unilatérale et parfois foudroyante) comme forme de divorce, ce qu’entérinera la Convention franco-marocaine dans son article 13. Le juge français s’est contenté pendant quelque années d’invoquer bien timidement l’article 5 du protocole n°7 de la CEDH (du 22 Novembre 1984 qui garantit « l’égalité de droits et de responsabilité de l’homme et de la femme lors de la dissolution du mariage ") pour vérifier l’absence de fraude, le respect des droits de la défense et les garanties pécuniaires. Car souvent le mari paralyse toute action introduite en France en vue de le faire contribuer aux charges du ménage, au-delà d’un « don de consolation » et de la pension alimentaire limitée à trois mois par la Mouddawana.

En 1990, une femme marocaine, et française depuis 1987, entreprend une procédure en divorce contre son mari, naturalisé français lui aussi et résidant en France, qui la répudie en 1988, depuis le Maroc. Le Tribunal de grande instance de Paris accepte l’application de la convention, c’est-à-dire que la répudiation produise effet en France « dès lors que la femme ne s’oppose pas à l’accueil de cette décision » (En 1993 le Maroc adapte la Mouddawana à la nouvelle situation : présence des deux époux, deux témoins, etc.). Mais la Cour de cassation se prononce différemment, insistant sur le rattachement au domicile ( pour le juge marocain, le « domicile conjugal » au Maroc où il peut intenter une action en « réintégration du domicile conjugal ») en matière de statut personnel et sur l’autonomie des personnes qui ont choisi de devenir françaises. On peut déplorer cette discrimination avec les Marocaines résidants en France, mais il semble naturel de prendre en compte la volonté pour les doubles-nationaux de choisir le système qui leur convient le mieux, solutions qu’ont plus ou moins institutionnalisée les Pays-Bas, l’Allemagne et l’Espagne. ( Commentaire : bien évidemment nous ne partageons en rien cette dernière remarque. Outre que sur notre sol c’est-à-dire en terre d’Occident seules les lois et valeurs occidentales doivent avoir droit de cité, il est assez inquiétant qu’une personne ayant obtenue la nationalité française préfère malgré cela se soumettre à une loi inique et humiliante. On peut se demander alors en quoi cette personne est française et porteuse des valeurs de l’Occident. L’auteur oublie en outre la pression de l’entourage qui s’exerce sur la personne et qui ne lui laisse parfois aucune véritable alternative que de se soumettre à la loi et la coutume mahométane).
 

Puis 1997 marque une revirement complet : la Cour considère désormais que la répudiation est contraire à l’ordre public en général non plus pour des raisons de procédure, mais parce qu’elle heurte le principe d’égalité des droits et responsabilités des époux.

Ainsi au Maroc, tous les musulmans quelle que soit leur nationalité – même une Française convertie à l’islam - sont soumis au droit musulman.

En France, tous les Français, quelle que soit leur religion, sont ( ou plutôt doivent être) soumis au droit français.
 
Pour conclure deux bonnes surprises…
La première nous vient de l’autre rive. Une Marocaine demande le divorce de son mari tunisien ; la Cour de cassation tunisienne écrate la loi marocaine en ce qu’elle est inégalitaire, attribuant des prérogatives unilatérales au seil époux. Pour le juriste Ali Mez, « la jurisprudence française pousse trop loin le prétendu respect des civilisations étrangères !

Elle méconnaît le respect des droits à la défense, la fraude à la loi, le principe d’égalité entre les sexes…il est difficile d’exclure les ex-cultures coloniales au nom de leur identité nationale du mouvement universel des idée
s ». Toniques remontrances !

La seconde vient de Libération (4 décembre 2001) qui titre : « une répudiation prononcée en Algérie est déclarée conforme à l’ordre public international. » La Cour de cassation, au motif qu’une mère algérienne a reçu des subsides, a été représentée, etc., l’a renvoyée, elle Algérienne de France, à sa condition d’inférieure, telle que le consacre son Code national. La Cour a consacré sa répudiation et son humiliation, enragent sa fille Léïla et ses sœurs blessées, qui s’apprêtent à déposer un recours devant la Cour européenne. La France a toutes les chances d’être condamnée au nom de l’article 5 du protocole n°7 L’espoir de la mise à l’écart progressive de toutes les règles du droit musulman serait anéanti, redoute leur avocate ! La Cour serait devenue sensible au relativisme culturel en vogue dans certains milieux judiciaires, conclut Libération que nous ne savions pas assimilationniste à ce point.

Le fameux article 5 ne garantit pas seulement l’égalité de droits de responsabilité des époux lors de la dissolution du mariage, mais encore entre eux durant le mariage, ce qui ne peut que boulverser les solutions admises en matière de polygamie, d’autorité parentale, de filiation naturelle surtout, qui sera la difficulté à l’ordre du jour demain éventuellement pour Leilia et ses sœurs. Heureusement pour elles, hier la mère algérienne vivant en Farnce ne pouvait pas intenter une action en recherche de paternité pour son enfant, algérien comme sa mère, puisque le juge français devait appliquer la loi algérienne qui prohibe cette recherche. La Cour de cassation ayant jugé que « les lois privant un enfant français ou résidant habituellement en France du droit d’établir sa filiation doivent être refusées », elle peut le faire depuis 1993. En sera t-il toujours ainsi ?


L’Avenir des filles…

Aurons-nous un jour un Code de statut musulman comportant la dévalorisation du témoignage de la femme devant un tribunal, la demi-part d’héritage pour les filles, l’indignité successorale du non-musulman, l’interdit à la femme musulmane d’épouser un non-musulman ?

La question nous est posée de manière récurrente. (Commentaire : et le fait même que nous puissions nous la poser sérieusement est en soi assez symptomatique ).

Dans le style de Tariq Ramadan, cela se dit « œuvrer pour une meilleure harmonie entre la personnalité musulmane et le paysage occidental » ; M. Bechari, vice président du CFCM, évoque des « légitimes revendications d’un droit d’une cultuire propre aux musulmans en France » (Commentaire : musulmans en France, vous aurez noté et non pas de France).

Le Centre européen de la fatwa et de la recherche, basé à Londres, recommande aux musulmans européens dans son Syllabus musulman d’œuvrer inlassablement pour obtenir l’exercice de tous leurs droits relatifs à l’organisation de leur statut personnel en matière de mariage, de divorce et d’héritage.
Tariq Ramadan nous suggère quelques précisions pratiques concernant la fille dont l’héritage égale la moitié de celui de son frère : « Le principe se comprend par rapport à la conception de la famille en islam où l’homme doit supporter totalement les charges financières d’entretien de sa sœur et de la famille. Mais l’appliquer à la lettre sans mesure compensatoire dans une société complètement déstructurée produit immanquablement une discrimination terrible. Le texte visait la justice, son application aveugle peut devenir injuste, il faut donc revoir son application pour être fidèle au principe de justice et proposer une allocation compensatoire versée par l’Etat » AFDHI : allocation à la fille défavorisée par l’héritage en islam en quelque sorte. Progressive ou forfaitaire ? (Commentaire : notez la sémantique ramadienne. Il n’y a pas condamnation du principe lui-même de cette discrimination mais proposition d’aménagement au sein d’une société destructurée, comprenez occidentale – c’est-à-dire décadente du point de vu de la morale islamique. Et notez bien qu’une société non destructurée est bien évidemment selon Ramadan une société… islamiquement correcte…).

Comment le laissent présager les considérations d’Ali Mezghani, le jour n’est pas venu qui verra l’harmonie juridique régner entre musulmans de soixante-dix pays différents. Quoi qu’il en soit, nos règles communes ne précèdent pas la volonté des hommes, mais en procèdent, selon la belle expression de Marcel gauchet.

Tariq Ramadan et d’autres revendiquent régulièrement « le droit des sociétés majoritairement islamiques de rester fidèles à leurs sources et de penser une organisation qui convienne à leur identité ».

Et bien, il nous faudra voter, sans écouter ceux qui à la manière de Louis Veuillot parlent de la tyrannie majoritaire , quand ils sont minoritaires, et du respect de la majorité là où ils sont majoritaires.

On ne peut sacrifier l’avenir des filles à l’enfance des mères.

(Commentaire : une conclusion quelque peu ambiguë. Il est évident que la stratégie islamique en Europe est de devenir grâce à l’immigration et la démographie une force demain – je dis bien demain, pas après demain- majoritaire. Mais, de notre côté, bien évidémment, nous ne saurions accepter le suicide des valeurs et de la civilisation occidentale quand bien même les vecteurs de ce suicide seraient élus par des élections démocratiques. Nos lois et valeurs ne sont pas négociables.


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