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28/08/2006

Le Liban, un Pays pris en otage

medium_JP-011005-Muhammed-Westerga.jpgEn réalité, si Tsahal n’a pas encore pu en finir avec le Hezbollah, c’est parce que celui-ci n’est pas une armée classique mais agit comme une guérilla révolutionnaire dissimulée au sein de la population civile prise en otage, véritable première victime de la folle stratégie de la Milice chiite islamiste. Les civils n’en finissent pas de payer le prix fort de cette guerre asymétrique du « fou au fort » voulue par les miliciens du Hezbollah aux ordres de l’Iran. Téhéran a en effet décidé d’embraser la région et d’y instaurer le chaos total tant que la communauté internationale refusera que Téhéran se dote de l’arme atomique. Le deal en cours de négociation est clair : vous laissez l’Iran se doter de l’arme atomique, et Téhéran deviendra une force de pacification. Sinon, le régime chiite iranien transformera, grâce au Hezbollah, au Hamas et au Jihad islamique, le Proche Orient en un véritable brasier. N’oublions pas en effet que l’offensive du Hezbollah contre Israël a été déclenchée au moment même où le Conseil de sécurité de l’ONU adoptait une résolution exigeant que « l’Iran suspende toute activité d’enrichissement et de retraitement, y compris la recherche et le développement, ce qui doit être vérifié par l’AIEA ». Rappelons également l’avertissement explicite du ministre iranien des Affaires étrangères, expliquant, lors de sa rencontre à Beyrouth, avec le Premier ministre libanais, que l’adoption du texte de la résolution de l’ONU sanctionnant l’Iran sur le dossier de l’enrichissement de l’atome risquerait d’« aggraver la crise dans la région »... Le leader druze libanais Walid Jumblat reconnaissait il y a peu que «l’enlèvement de deux soldats israéliens a été secrètement préparé à Damas deux jours avant la réunion du G8, de façon à détourner l’attention de l’Iran. L’envoyé iranien lui-même, Larijani, a transmis le code pour mettre en œuvre le plan d’enlèvement afin de déclencher une effervescence internationale susceptible de détourner l’attention du monde de la crise nucléaire iranienne ». Quant au leader libanais sunnite Saad Hariri, fils du Premier ministre assassiné par Damas, il n’a pas hésité à pointer du doigt « l’appareil de sécurité du Président syrien » qui aurait « incité Nasrallah à embraser le Liban… », devenu le « terrain de bataille d’autres pays qui nous appellent frères, mais qui se fichent de notre destin ».
En réalité, et conformément à un document écrit retrouvé dans un local du Hezbollah, la milice pro-iranienne attendait l’intervention israélienne depuis longtemps et a tout fait pour la précipiter dans une logique de chaos qui échappe à la rationalité étatique mais qui est la marque du totalitarisme islamiste révolutionnaire d’essence mortifère et nihiliste. Nul doute qu’avec l’incursion en territoire israélien du Hezbollah le 12 juillet dernier, puis l’assassinat de sept soldats et le kidnapping de deux autres couplés avec des tirs de roquettes sur le Nord d’Israël, le Hezbollah a tout fait pour provoquer ce conflit non pas en tant que mouvement de « résistance » libanaise mais en tant que force terroriste de « collaboration » avec l’Axe irano-syrien anti-occidental. L’escalade a donc bel et bien été décidée par l’Iran via la choura karar, la plus haute instance de décision du Hezbollah dotée de sept membres, dont deux Iraniens attachés à l’ambassade d’Iran à Beyrouth et liés aux services de renseignements de Téhéran.

Le Hezbollah : une force syro-iranienne d’occupation et non une force de « résistance »…

L’armée iranienne est directement présente au Liban. Près de 150 Gardiens de la révolution iranienne (Pasdarans) appuient le Hezbollah dans sa « Résistance » contre Israël. Grâce à la capture ces derniers jours par Tsahal de membres du Hezbollah et à la diffusion par Tsahal lundi 7 juillet.de l’interrogatoire d’un de ses membres, Hussein Ali Suleyman, les informations dont on dispose sur le Hezbollah sont de plus en plus précises. La milice apparaît en effet comme une véritable armée extérieure de l’Iran, équipée comme un Etat, à certains égards bien mieux préparée que l’armée libanaise. Les Pasdarans ont assuré la formation des combattants hezbollahis. Ils leur ont appris le maniement des roquettes dans les camps iraniens ou de la Bekaa, à concevoir des « explosifs improvisés » - utilisés avec des effets dévastateurs contre les blindés américains en Irak – et même à manier des drones et des C-802, missile sol-mer. Le Hezbollah est abondamment équipé de gilets pare-balles, de lunettes de vision de nuit, de très bons systèmes de communications, de stocks stupéfiants de missiles syriens et iraniens, de roquettes chargées de roulements à bille anti-personnel, de systèmes de communications par satellite et d’armes d’infanterie parmi les meilleures, y compris d’antitank russes et d’explosifs Semtex, lesquels ont permis au Hezbollah, grâce au maniement habile des guidage laser ou radio et des ogives explosives doubles, d’occasionner des pertes aux forces de Tsahal. Les missiles anti-tanks russes conçus pour pénétrer au travers du blindage ont endommagé et détruit des véhicules israéliens, notamment les Merkava.
Du point de vue tactique, le Hezbollah utilise des tunnels d’où ses hommes peuvent aisément et rapidement sortir, tirer des missiles antitank portés sur l’épaule et disparaître derechef, à l’instar des rebelles Tchétchènes lorsqu’ils utilisaient les égouts de Grozny pour attaquer les blindés russes. Le Hezbollah utilise aussi des missiles anti-tanks, dont les Sagger plus anciens, pour mettre le feu dans les abris des troupes israéliennes. Cette véritable armée, forte d’environ 2000 hommes, est alimentée par nombre de combattants occasionnels chargés notamment de la logistique et de cacher les armes dans des bâtiments à usage civil ou dans les reliefs vallonnés du Sud. Il faut ajouter à cet arsenal des drones (iraniens) comme celui envoyé au sud d’Israël le long de la côte, le 7 juillet, et que l’armée de l’air israélienne a détruit en vol au large de Haïfa, ou encore celui abattu à 10 km de la côte méditerranéenne par un avion de combat israélien F-16 et que le Hezbollah avait envoyé au dessus du territoire libanais. Il s’agissait là de la troisième tentative d’infiltration de l’espace aérien israélien à partir du Liban par un drone au cours des deux dernières années.
Les jeunes Israéliens comme leurs dirigeants acceptent les conséquences des nouvelles offensives qui impliquent des pertes humaines importantes. D’après eux, cette guerre est existentielle non seulement pour Israël mais pour l’Occident dans son ensemble, dont le mode de vie et la Liberté sont menacées dans leur fondement par le fanatisme et l’obscurantisme représenté autant par les Islamistes chiites au pouvoir à Téhéran que par leurs concurrents salafistes sunnites d’Al Qaïda ou du Hamas. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter les dernières déclarations des deux faces de Janus du Fascisme vert : l’Ayatollah chiite iranien Ali Khamenei, véritable homme fort de Téhéran et patron du Hezbollah, qui a appelé ’’l’ensemble des communautés de l’Islam à se joindre à la lutte que mène le Hezbollah contre Israël’’ et déclaré que ’’les Etats-Unis et les Sionistes, de concert avec des pays européens, tentent d’effacer l’islam de la région’’. Tout comme son homologue-concurrent sunnite Ayman al Zawahiri, numéro deux d’Al Qaïda, dont le dernier communiqué revendique pêle-mêle le retour de l’Andalousie espagnole et d’Israël (Palestine) à l’Islam, puis rappelle que la lutte contre Israël est indissociable de celle contre les « Croisés » (Chrétiens, Salibiyoun)…
Plutôt que de fustiger Israël, avant-poste de l’Occident et de la Démocratie au Proche-Orient, les Européens devraient plutôt songer aux conséquences désastreuses d’un nouveau Munich. Car c’est bien l’accession de l’Iran au rang des puissances atomiques qui est en jeu et pour laquelle se bat le Hezbollah. Et à ceux qui fustigent les « massacres » perpétrés par Tsahal dans sa guerre contre le Hezbollah, il convient de poser la question suivante : pourquoi les morts (certes à déplorer) de Cana ou de Gaza pèsent toujours plus lourd que ceux de Tel Aviv, Haïfa, mais aussi Bagdad, Nadjaf, New Dehli, Bombay, Casablanca, etc ?

Alexandre del Valle, est l’auteur du Totalitarisme islamiste à l’assaut des démocraties et du Dilemme turc (Les Syrtes). Co-fondateur de l’Institut géopolitique de la Méditerranée (Nicosie), il collabore à plusieurs publications (Politique Internationale, Outre Terre, Valeurs Actuelles, Spectacle du Monde, France Soir, etc).


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