26/02/2010
Aujourd'hui Malaisie, demain Europe!
Ils tendent leurs paumes vers un Christ auréolé de rose fluo et ils pleurent. De leurs prières, des mots s'échappent : «cocktail Molotov», «stupeur», «liberté religieuse menacée». La brume ne s'est pas encore dissipée sur les faubourgs de Kuala Lumpur, mais, dans l'église de l'Assomption, vandalisée il y a peu, les paroissiens sont venus nombreux pour évoquer la «querelle d'Allah».
La Malaisie est secouée par une vague de violences inédites contre ses églises. En quelques jours, onze lieux de culte ont été la cible d'attaques et de dégradations. Au départ de la polémique qui divise le pays : The Herald. Cet hebdomadaire catholique local revendique le droit d'user, pour désigner Dieu, du terme d'«Allah» dans son édition de langue malaise, destinée aux fidèles de l'île de Bornéo. À l'issue d'une longue bataille juridique, la Haute Cour de Kuala Lumpur a autorisé, le 30 décembre dernier, les non-musulmans à utiliser le nom «Allah» dans leurs écrits. Mais, face à la colère de groupes islamiques et aux pressions du gouvernement, qui a agité la menace de tensions interconfessionnelles, cette même cour a suspendu son autorisation le 6 janvier dans l'attente d'un jugement en appel.
Dans l'église de l'Assomption, sous des ventilateurs qui peinent à dissiper la moiteur de l'été tropical permanent, le ton du sermon du révérend Larry Tan est ferme : «Si nous cédons sur ce point, nous ne cesserons de perdre du terrain pour notre pratique religieuse.»
Changement de décor : à la sortie de la mosquée Asy-Shyakirin, à deux pas des tours jumelles Petronas, emblème de la modernité malaisienne, Muhammad Faisal Abdul Aziz, président d'une association d'étudiants musulmans, explique que l'emploi du terme «Allah» par les chrétiens est susceptible de «créer la confusion et favoriser le prosélytisme». «Où s'arrêteront les chrétiens ? Bientôt, ils vont appeler leur église la maison d'Allah et leur Bible, les versets d'Allah». Derrière lui, un homme bedonnant, ne décolère pas : «Allah n'appartient qu'aux musulmans.» Peu lui importe que dans la plupart des pays arabophones, le mot «Allah» désigne à la fois le mot «dieu» et le Dieu de l'islam et qu'il soit utilisé par les non-musulmans. «En Malaisie, l'usage du nom d'Allah est une exclusivité musulmane», insiste-t-il.
«La religion est devenue un facteur de division de notre société», estime l'analyste politique, Chandra Muzaffar. La Malaisie qui était autrefois une nation multiraciale unie est aujourd'hui tiraillée entre ses trois communautés ethniques : les Malais musulmans (60 % des 28 millions d'habitants du pays) et les minorités chinoises et indiennes, réparties entre chrétiens (9 %), bouddhistes et hindouistes.
Derrière «l'absurdité de cette histoire de sémantique», c'est l'islamisation de la société et du débat public qui inquiète le père Lawrence Andrew, directeur du journal catholique au cœur de la polémique. «Cette mainmise sur le mot d'"Allah" est une façon de réaffirmer l'identité et la prééminence politique des Malais, estime-t-il. C'est dans la même veine que la notion de "suprématie malaise", dont le gouvernement nous rebat les oreilles.»
Anwar Ibrahim, principal opposant du pays, y voit également «une manipulation de la question religieuse». «Ce rigorisme affiché par l'Umno, la coalition gouvernementale sclérosée et gangrenée par la corruption, est une tentative désespérée de se faire passer pour un parti islamique et récupérer l'électorat malais conservateur qui l'a déserté au dernier scrutin», explique le chef de l'opposition parlementaire.
Pour Aziz Bari, spécialiste de droit constitutionnel, l'explication tient aussi dans la Constitution du pays, un texte quelque peu ambigu qui garantit la liberté de religion, mais qualifie l'islam de religion officielle. «Dans un pays où la Constitution met en équation les identités malaise et musulmane, la ligne de démarcation entre la race et la religion ne peut être que floue», estime l'universitaire.
Dans cette ambiance délétère, la Malaisie a du mal à échapper au poids des divisions communautaires : sur le campus de l'université islamique internationale, les discussions sur la supériorité et l'identité malaises nourrissent la haine contre les «pilleurs chrétiens». Et l'ostracisme des non-musulmans est tel qu'ils perdent leur sentiment d'appartenance à ce pays qu'ils considéraient jadis comme le leur. L'implosion guette un pays, dévoré par le démon identitaire.
SOURCE de l'article : www.figaro.fr
ndr : ISLAM = RACISME COMMUNAUTARISTE, PARTOUT DANS LE MONDE
16:54 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.