22/05/2008
Algérie: l' Etat Musulman persécute et discrimine les chrétiens
Interpellée en possession de bibles et d'évangiles, Habiba Kouider est accusée de «pratiquer un culte non musulman, sans autorisation». Notre correspondant a suivi son procès mardi.
Le tribunal correctionnel de Tiaret a abrité, mardi, un procès surréaliste. L'accusée, Habiba Kouider, une chrétienne de 37 ans, est éducatrice dans une crèche. Elle comparaît pour détention de livres religieux, un délit passible de prison depuis l'adoption, en février 2006, de la loi qui réglemente «les cultes non musulmans». Le 29 mars 2008, alors qu'elle se rendait en bus d'Oran, où elle fréquente l'école biblique, à Tiaret, son lieu de résidence, elle est interceptée par des gendarmes. Dans son sac, ils découvrent les pièces à conviction : des bibles et des évangiles. Ils l'arrêtent et la transfèrent à la police, qui la place en garde à vue. Plusieurs officiers se relaient alors pour un interrogatoire humiliant de la «mécréante». Le lendemain, elle est présentée au procureur, qui lui propose un curieux marché : «Tu réintègres l'islam, et je classe le dossier ; si tu persistes dans le péché, tu subiras les foudres de la justice !» Réservée, presque timide, Habiba Kouider a peur, mais elle refuse de renier sa foi.Trois ans de prison requis
Mardi, face au juge qui la presse de questions ironiques, elle répond avec dignité. «Quelle est ta religion ?» demande le magistrat. «Je suis chrétienne. Je me suis convertie en 2004 à l'église d'Oran», répond-elle d'une voix presque inaudible. Avec un sourire méprisant, le juge reprend : «Les curés t'ont fait boire leur eau bénite qui mène au Paradis.» Elle ne répond pas. En remarquant la présence de journalistes dans la salle, le juge les interpelle : «Avez-vous une autorisation pour prendre des notes ?» Me Khelloudja Khalfoun, qui défend l'inculpée, intervient : «L'audience est publique, les journalistes ont le droit d'être là.» Lorsque les robes noires de Tiaret, sollicitées pour «défendre la chrétienne», se sont défaussées, les dignitaires de l'Église protestante se sont tournés vers cette avocate du barreau de Tizi-Ouzou, rompue aux procès sensibles. Le juge perd son calme, menace de «prendre des mesures», avant de confisquer les carnets des journalistes ! Sous le regard de la presse, les magistrats perdent de leur arrogance. Sans conviction, le procureur rappelle que «l'islam est religion d'État» avant de requérir trois ans de prison ferme. Me Khalfoun plaide «la liberté de conscience garantie par la Constitution» et demande la relaxe de sa cliente. Un résumé de deux visions antagonistes qui s'affrontent dans la société algérienne. Le verdict sera rendu le 27 mai. Le même jour, devant le même tribunal, six autres chrétiens comparaîtront pour «distribution de tracts visant à ébranler la foi des musulmans». Depuis janvier 2008, les procès pour «délit de chrétienté» se sont multipliés dans l'Ouest algérien, notamment à Oran, Mascara et Bel-Abbès. Comme les militants d'opposition de la dictature du parti unique, les néoconvertis sont contraints de vivre leur foi dans la clandestinité. Sans rire, le ministre algérien des Affaires religieuses se veut rassurant : «La communauté chrétienne jouit de tous les droits ; mais nous luttons contre les sectes !»21:18 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : islam, islamisation, christianisme, mpf, ump, ps, laicité
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