19/06/2009
Islam, culture des Lumieres
Le gouvernement français n'a pas exclu vendredi une loi pour interdire le port du niqab ou de la burqa, devant le débat lancé par des parlementaires qui dénoncent ce voile intégral revêtu par certaines femmes musulmanes en France.
Une enquête "doit nous permettre de voir plus clair sur le sujet", de "mesurer l'ampleur du phénomène et puis ensuite de prendre les décisions qui s'imposeront", a affirmé le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel. "Pourquoi pas" une loi, a-t-il dit.
Une demande de commission d'enquête parlementaire sur le port de la burqa, signée par une soixantaine de députés a ravivé ces derniers jours la polémique sur la laïcité en France, seul pays européen à avoir légiféré, en 2004, pour interdire le voile islamique à l'école.
Signe de la sensibilité du sujet en France, où vivent 5 millions de musulmans, la question divise les associations, la classe politique, et jusqu'au gouvernement.
La secrétaire d'Etat à la Ville Fadela Amara, d'origine algérienne, a prôné vendredi "l'interdiction totale de la burqa" et qualifié le niqab de "cercueil qui tue les libertés fondamentales".
En revanche, le ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale Eric Besson a réaffirmé son "scepticisme" face à une loi qui serait "inefficace". La veille, il avait déjà jugé "inopportun de relancer une polémique" sur les signes religieux et "dangereux" de remettre en cause l'équilibre trouvé par la loi de 2004.
D'autant que le port du voile intégral est considéré comme "très marginal" par les organisations musulmanes. Quelque 2.500 femmes, se réclamant du salafisme, un islam puritain et ritualiste, seraient concernées, selon des enquêtes récentes.
L'opposition socialiste a appelé à éviter les solutions "simplistes". "Bien sûr qu'on est opposés à la burqa, au voile intégral, mais ce que je souhaite d'abord c'est qu'on s'occupe de l'insertion de ces populations", a expliqué sa dirigeante Martine Aubry, faisant référence au chômage qui frappe particulièrement les banlieues défavorisées à forte population musulmane.
C'est dans la périphérie des grandes villes, comme Paris et Lyon (centre-est), que le phénomène du niqab est le plus visible et en augmentation, selon les parlementaires favorables à son interdiction.
Le Conseil français du culte musulman (CFCM), organe représentatif de la communauté, s'est élevé contre l'idée d'une enquête parlementaire, craignant un "amalgame" et la "stigmatisation des musulmans".
Une idée partagée par Cyrille Aillet, spécialiste de l'islam à l'université de Lyon II: "ce débat n'a pas lieu d'être dans la mesure ou c'est un phénomène ultra-minoritaire et ou il y a déjà un dispositif législatif en France".
"Légiférer sur ce point c'est faire le jeu des extrémismes car quand ce type d'insigne (burqa, niqab) est porté c'est le signe d'une pratique puritaine de la religion", dit-il.
Pour Dounia Bouzar, ex-membre du CFCM spécialiste de l'islam en France, poser le débat sur le niqab dans des termes religieux est une erreur. Elle estime que "l'argument sécuritaire" doit être utilisé, comme en Belgique, où dans certaines villes toute personne qui masque son visage hors période de carnavals est passible d'amende. "C'est du droit commun. Cela ne stigmatise pas de religion", dit-elle à l'AFP.
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